Maniac (Michael Carreras, 1963)
Geoff Farrell en fâcheuse posture (Donald Houston, Kerwin Mathews) |
L'arrivée du personnage de Farrell rappelle celle de Frank Chambers dans Le Facteur sonne toujours deux fois (Tay Garnett, 1946) : sorti de nulle part, il est séduit par la gent féminine du coin après avoir rapidement éconduit une précédente conquête ; il va ensuite proposer ses services (ici, il répare un juke-box). Plus tard, une scène assied ce mode d'attraction / séduction : alors que Geoff joue au Yams avec Annette tard dans la nuit, et que les deux personnages commencent à se rapprocher, Eve, la belle-mère, fait irruption dans la pièce, congédie la jeune fille... et prend sa place autour du plateau de jeu. Cette prise de pouvoir sonne aujourd'hui quelque peu désuète et manque d'impact, à l'image du twist dansé du bout des pieds par Geoff et Annette...
Une partie de Yams sous haute tension (Kerwin Mathews, Liliane Brousse) |
Michael Carreras, plus souvent producteur, est un réalisateur de circonstance -il a remplacé Seth Holth, terrassé par une crise cardiaque peu avant la fin du tournage de La Momie sanglante, et pris la place de Leslie Norman qu'il a lui-même viré de la production du Peuple des abîmes-, et n'a apparemment jamais eu de velléité de s'affirmer dans cet exercice. Ici, il réalise un travail honnête mais sans éclat ; Jimmy Sangster jugera que le décor naturel, pourtant assez spectaculaire, n'a pas été suffisamment mis en valeur par la mise en scène*. Pour autant, Sangster n'était pas si critique que cela envers Michael Carreras, qu'il trouvait "moins bon que [Terence] Fisher, mais meilleur qu'une demi-douzaine d'autres qui ont travaillé pour Hammer, mais que je ne nommerai pas."* La mise en scène de la traque du maniaque au début du film reste paresseuse.
Le jeu
de Liliane Brousse, quant à lui, est régulièrement à la limite de l'amateurisme, mais ce n'est pas tout ; Kerwin Mathews est plutôt lisse, mais son style avait déjà marqué dans L'Attaque de San Cristobal (John Gilling, 1962), et il avait déjà incarné les héros droits et sans défauts pour les belles heures du cinéma d'aventures familial (Le septième voyage de Sinbad (Nathan Juran, 1958), Les Voyages de Gulliver (Jack Sher, 1960) ou encore Jack le tueur de géants (Nathan Juran, 1961). On croise également George Pastell, habitué des seconds rôles chez la Hammer : son physique exotique lui donne accès au rôle de Mehemet Bey dans La Malédiction du pharaon (Terence Fisher, 1959), ou encore celui du grand prêtre de Kali dans Les Étrangleurs de Bombay (Terence Fisher, 1959). Le scénario signé Jimmy Sangster accumule les facilités. Eve convainc son
amant de l'aider à faire évader son mari ; ce dernier n'étant a priori
pas dérangé par le fait que sa femme et un concurrent amoureux lui
viennent en aide. Au rayon des twists, on est servi, mais la cohérence
de l'ensemble a été sacrifié sur l'autel du sensationnel, notamment
dans l'amphithéâtre d'Arles ou lors du final dans une carrière. Ces séquences figurent par contre dans les réussites esthétiques du film, où l'immensité de la construction semble dominer tous les êtres.
Le film sort sur les écrans britanniques le 20 mai 1963 distribué par BLC, en double-programme avec Les Damnés (Joseph Losey), d'un tout autre calibre (et pourtant relégué en deuxième partie de programme). Les américains découvrirent quant à eux Maniac à partir du 30 octobre de la même année, sous la bannière de Columbia, accompagné de Le Manoir aux fantômes / The Old Dark House (William Castle), une autre production Hammer bien plus en accord avec la fête d'Halloween toute proche -par ailleurs remake de La Maison de la mort (James Whale, 1932). Sur l'affiche américaine, le film est aussi titré 'The Maniac", forme que reprend l'édition Blu-ray française de l'éditeur ESC.
* : Jimmy Sangster dans son livre Inside Hammer (2001).
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